Jean Dunand, comme un poisson dans l'eau


Attendu au plus haut à 30 000 €, ce paravent de Jean Dunand changeait d’intérieur pour 125 000 €. Magicien du métal sur ses vases de dinanderie, récompensés par une médaille d’or saluant l’habileté de leur réalisation et l’inventivité de leur décor lors de l’Exposition internationale de Milan, en 1906, il utilise ici l’or et l’argent de manière tout aussi graphique. Dans des rais de lumière dorée pénétrant l’eau noire de la laque, il fait varier à l’envi les motifs animant le corps de ses poissons, dont les têtes sont tatouées de motifs géométriques semblables à ceux de ses vases. Le museau cerclé d’une frise de triangles, le front paré de petits cercles entre de gros yeux ronds, ils libèrent des bulles parfaitement cylindriques, paille- tées de métal précieux. La délicatesse du travail de Dunand se marie à merveille avec le raffinement du japonisme, en vogue dans les arts décoratifs français depuis la participation de l’em- pire du Soleil-Levant à l’Exposition universelle de Paris, en 1900. Son ouverture à l’Occident, en ce début de XXe siècle, a balayé des siècles d’isolement. L’Asie était aussi célébrée par l’artiste vietnamien Vu Cao Dam, dont la Tête de jeune femme en terre cuite séduisait à hauteur de 65 000 €. Son modèle est une beauté tonkinoise, mais sa technique de modelé, laissant volontairement apparaître les traces du geste créateur dans la glaise, est celle d’artistes comme Rodin ou Giacometti, dont il a pu admirer les œuvres après son arrivée à Paris, en 1931 (21 x 12 x 12 cm, voir Gazette n° 14, pages 78-79). Côté mobi- lier, l’art déco était également représenté par une paire de guéridons créés par Lucien Rollin dans les années 1930, à dou- bles plateaux ovales en palissandre et pieds cannelés terminés par quatre patins d’acier, vendus sur réitération des enchères pour 55 000 €.

SAINT-CLOUD, DIMANCHE 11 AVRIL.
LE FLOC’H OVV, CABINET MARCILHAC.

Jean Dunand (1877-1942), paravent à deux feuilles en laque noire, décor argent et or de carpes et de plantes aquatiques, 1928, une feuille signée en creux, 192 x 80 cm chaque.Adjugé : 125 000 €

Sophie Reyssat - La gazette Drouot n°15 - Vendredi 16 avril 2021