Le canard est toujours vivant !


Le mot d’ordre était «À table !» et, pour l’illustrer, les petits plats se mettaient dans les grands avec cette presse à canard de la maison Christofle.

On le sait – même si on ne l’a pas goûtée –, la renommée du restaurant La Tour d’Argent s’est construite notamment sur la fameuse recette du canard au sang.

C’est en 1890 que son nouveau propriétaire, l’ancien maître d’hôtel Frédéric Delair, rouennais d’origine, en codifie la recette. Le caneton doit être étouffé, cuit saignant et une fois que les aiguillettes ont été prélevées, la carcasse est pressée pour en extraire le sang et les sucs, qui sont ensuite liés à la sauce. Le plat était fini d’élaborer devant le client et s’accompagnait d’un rituel immuable : découper le volatile à bout de fourchette, sans qu’il touche le plat. Particularité supplémentaire originale, chaque petit sacrifié était numéroté. Pour obtenir ce jus unique, une presse était nécessaire.

La maison Christofle, fleuron des arts de la table, conçut évidemment un modèle en métal argenté. Celui proposé à Saint-Cloud était dégusté à point à 13 125 €. Il avait appartenu à un certain Alfredo Guedes, riche Brésilien résidant à Paris au tournant du XXe  siècle. Amateur de bonne chère, il fréquentait assidûment le célèbre restaurant du quai de la Tournelle et, selon la tradition familiale, c’est justement de l’institution centenaire que cette presse proviendrait.

DIMANCHE 2 OCTOBRE, SAINT-CLOUD. LE FLOC’H OVV.

Christofle, vers 1900, presse à canard en métal argenté ornée de palmettes et volutes feuillagées, 50 x 33 x 22 cm, montée sur un socle en acajou. Adjugé : 13 125 €

LA GAZETTE DROUOT N°35 DU 7 OCTOBRE 2022